CHIHARU SHIOTA tisse sa toile

Grande rétrospective au Grand Palais

Chiharu Shiota -Where Are We Going ? 2017/2024-Laine blanche, fil de fer, corde -Vue de l’exposition Chiharu Shiota-The Soul Trembles, Grand Palais, Paris 2024 Scenographie Atelier Jodar © GrandPalaisRmn 2024 / Photo Didier Plowy © Adagp, Paris, 2024 and the artist

"Tisser une toile autour de mon corps"

Co-organisée avec le Mori Art Museum de Tokyo, l’exposition « Les frémissements de l’âme » présente notamment sept installations monumentales recréées et retissées par l’artiste japonaise devenue incontournable. A ne pas manquer jusqu’au 19 mars.

L’artiste japonaise Chiharu Shiota est devenue incontournable. En trente ans, elle a participé à plus de trois cents événements, personnels ou collectifs. L’an dernier, elle était invitée à la biennale d’Aix-en-Provence avec trois installations monumentales. On la retrouve en majesté jusqu’au 19 mars 2025 au Grand Palais de Paris. L’intérêt de « The Soul Trembles » (« Les frémissements de l’âme ») est de retracer l’itinéraire créatif de cette quinquagénaire depuis ses débuts dans les années 90. Co-organisée avec le Mori Art Museum de Tokyo, cette rétrospective est la plus importante jamais consacrée à l’artiste en France.

Jusqu’à 40 kilomètres de fils

Native d’Osaka, elle est installée à Berlin depuis 1999. Son œuvre est immédiatement reconnaissable avec ses réseaux de fils rouge, noirs ou blancs (jusqu’à 280 kilomètres pour certaines compositions). Pourtant, elle a débuté avec des toiles abstraites qu’elle a abandonnées. « J’ai voulu trouver mon médium, moins chargé de théorie et d’histoire » a -t- elle expliqué. Cette réflexion l’a menée vers une première performance en mouvement (« Devenir peinture ») lors de laquelle elle avait recouvert son corps de peinture rouge.

Par la suite, des fils de couleurs remplaceront les coups de pinceaux. Celle qui a étudié auprès de Marina Abramovic, pionnière de l’art de la performance, a trouvé son propre matériau. Elle a eu l’occasion de s’en expliquer. « Lorsque j’étudiais en Allemagne, j’ai déménagé neuf fois en l’espace de trois ans et il m’arrivait de ne plus savoir où j’étais en me réveillant le matin. J’ai pris du fil que j’avais dans ma chambre et j’ai commencé à tisser une toile autour de mon corps et de mon lit. J’avais l’impression de dessiner dans ma chambre ».

Cocons et valises

Il y a une autre signification à cette expression en trois dimensions : l’émotion et les sentiments. « Après le diagnostic de mon cancer en 2005, j’ai voulu peindre mes sentiments (…) et travailler avec des matériaux qui resteraient après la disparition de mon corps » a-t-elle confié.

Cette rétrospective donne à voir sept installations à grande échelle recréées par l’artiste. De « Où allons-nous ? », dans le grand hall, avec des barques enserrées dans un tissage de fils blanc qui prennent l’allure d’anges. A l’Accumulation  de 220 valises suspendues à leur ficelle rouge, un questionnement sur le voyage et l’exil. Près de l’entrée, avec « Voyage incertain » le visiteur traverse des nuées et des vagues rouges qui jaillissent de barques noires. Souvenir à des réfugiés risquant leur vie sur des bateaux de fortune, référence aux liens entre les humains, dont les réseaux sociaux qui les connectent aux événements mondiaux et influencent leur état d’esprit.

Piano emprisonné

Entre ces repères, il y a trois œuvres, très différentes mais toutes impressionnantes, témoins de l’humanité de Chiharu : « En silence », avec ce piano emprisonné dans un cocon de fils noirs, inspiré par un incendie dont elle a été témoin, à l’âge de neuf ans, méditation sur le son et l’absence. « Connecter de petits souvenirs », avec une foultitude de maisons de poupées, chinées aux puces de Berlin. Et enfin, « Intérieur extérieurs » haute structure constituée de fenêtres collectées sur les chantiers de Berlin est. Pas de fils dans ces deux cas, mais toujours une connexion aux relations humaines.

Et après ? « Les visiteurs sont libres de ressentir ce qu’ils veulent, l’art contemporain n’a pas de réponse unique » estime l’artiste araignée.

Isabelle BRIONE

Les frémissement de l’âme – de Chiharu Shiota, jusqu’au 19 mars 2025 au Grand Palais à Paris. Infos : grandpalais.fr/fr

Chiharu Shiota -Uncertain Journey (« Voyage incertain ») – 2016/2024 – Cadre métallique, laine rouge – Vue de l’exposition Chiharu Shiota The Soul Trembles, Grand Palais, Paris 2024 Scenographie Atelier Jodar © GrandPalaisRmn 2024 / Photo Didier Plowy © Adagp, Paris, 2024 and the artist

CHIHARU SHIOTA tisse sa toile

© 2025 The Glam Attitude - Tous droits réservés