Conversation avec Dominique Blanc

Festival Lumière Lyon

                            Photo ci-dessus : Dominique Blanc à l’ouverture du Festival Lumière © Sandrine Thesillat     

Patrice Chéreau, un visionnaire

Thierry Frémaux, directeur du festival Lumière, voulait l’inviter depuis longtemps, mais Dominique Blanc a un emploi du temps bien chargé entre le théâtre et le cinéma ! Le public l’a retrouvée dans « Partir un jour » présenté en ouverture du festival de Cannes. Elle a enfin participé à une masterclass, le dimanche 12 octobre 2025, sur la scène du Pathé de Lyon.

Corsage saumon, pantalon clair, cette Lyonnaise -Croix Roussienne- a dit sa « joie, le grand bonheur et le grand honneur » que lui procurent ce retour à la maison. Questionnée pendant une heure et demie par le journaliste Carlos Gomez, puis le public, elle s’est montrée disponible, chaleureuse, voire taquine, n’hésitant pas à prendre les intonations de Jean-Luc Godard quand elle l’évoquait (ce qui n’est pas son meilleur souvenir de débutante). Dévoilant une forte personnalité, on s’en doutait, qui lui a permis de réussir dans cette carrière. Car, au début, ce n’était pas gagné…

« Tu peux prendre la porte tout de suite »

Premiers souvenirs de cinéma : son frère cinéphile l’emmène voir des films … de guerre. A Lyon, elle prend ses premiers cours auprès de Janine Berdin (1). C’est elle qui « allume la flamme » et lui conseille de préparer le Conservatoire de Lyon. Barrage paternel. « Si tu veux faire ça, tu peux prendre la porte tout de suite » lui répond, un soir d’hiver, son médecin de père. Finalement, elle suit deux années d’études en architecture avant d’intégrer le cours Florent (en cachette) à Paris. Elle n’a pas d’argent, François Florent l’emploie comme femme de ménage pour qu’elle puisse financer ses leçons.

Du courage

À une jeune femme qui lui demande des conseils, elle répond : « il faut du courage et de la pugnacité. Se fier toujours à son instinct, au fond de soi, on sait ». Ce courage, elle en fait preuve, récemment, quand un metteur en scène s’en prend à elle, personnellement. « Au début, vous essayez de vous en sortir toute seule. Et puis, arrive un stade où vous n’arrivez plus à jouer. Car la personne est tellement sadique qu’elle vous foudroie ». Dominique Blanc n’a pas abandonné, « même si c’était douloureux ». Pour la première fois, « j’ai appelé mon agent au secours, qui a appelé le producteur, il est venu et cela s’est réglé ».

Les hommes de sa vie

Au début, il y a Pierre Romans, un autre Lyonnais, cofondateur des Amandiers, atelier de théâtre. Avec lui, elle travaille un an sur Tchekhov. Il a « un regard qui vous reconnaît et qui vous donne confiance ». La comédienne multi récompensée (2) observe : « arriver à exister quand on vient d’une fratrie de cinq, c’est compliqué ».

Puis arrive Patrice Chéreau, dont le regard lui « donne des ailes », au théâtre et au cinéma. Chéreau dont la version restaurée de la Reine Margot est visible en salles depuis le 1er octobre. Et dont la version restaurée de « Ceux qui m’aiment prendront le train » est annoncée en salles pour le 5 novembre. « C’était un visionnaire, son film est tellement moderne et contemporain ! » Et bien sûr, Régis Wargnier, avec « La Femme de ma vie », « Je suis le seigneur du Château » et « Indochine ».

Ses projets

– Le spectacle « Contre » sur le couple Gena Rowlands/John Cassavetes sera joué au théâtre du Petit Saint Martin (Paris) en janvier 2026. Confidences de Dominique Blanc : l’actrice américaine, disparue en 2024, est « la figure qui m’a inspirée ». « J’avais aussi une grande passion pour Romy Schneider », jusqu’à aller faire de la figuration dans « La Banquière ». 

– Elle remplacera Danièle Lebrun dans « La Ballade de Souchon » au théâtre Montparnasse (Paris) en mars 2026.

– Elle sera à l’affiche dans la reprise du « Tartuffe ou l’hypocrisie » à la Grande halle de la Villette en mai/juillet 2026

– On la reverra également dans « La Douleur » en 2028/2029. Ce texte de Marguerite Duras, mis en scène par Patrice Chéreau, avait été repris lors des 10 ans de la disparition du réalisateur. Janine Berdin, sa professeure, « âgée, aveugle et en fauteuil roulant est venue assister à une représentation au TNP de Villeurbanne », a confié son ancienne élève aujourd’hui sexagénaire (… distinguée par le Molière de la meilleure comédienne pour ce rôle). Jolie boucle !

Isabelle BRIONE

(1) – Fondatrice du Petit Théâtre de Poche dans le Vieux Lyon, elle est décédée en 2023 à presque 99 ans.

(2) – Meilleure actrice pour « Stand by », meilleure actrice dans un second rôle pour « Milou en mai » et « Indochine ». Molière de la meilleure comédienne pour « Une maison de poupée » et « La Douleur ».

Pour en savoir plus sur Dominique Blanc : « Chantiers, je » chez Actes Sud en 2023 dans lequel elle évoque les étapes fondatrices de son parcours de comédienne. Elle préfère ce terme à celui d’actrice, qui « rime avec caprice »…car elle « en a rencontré quelques-unes » !

Festival Lumière – Le prochain festival aura lieu en octobre 2026 – Plus d’informations sur : festival-lumiere.org

Photo ci-dessus : Masterclass de Dominique Blanc © Olivier Chassignole

Photo ci-dessus : Masterclass de Dominique Blanc  © Olivier Chassignole

Photo ci-dessus : Dominique Blanc à l’ouverture du Festival Lumière © Jean-Luc Mege

Photo ci-dessus : Dominique Blanc à l’ouverture du Festival  Lumière © Lea Rener