helmut berger

Trop près du soleil...

Photo : D.R – En 1966 à Laco Ameno sur Ischia, où se trouve le château La Columbaia  (La Colombe) de Visconti

L'ange décline,
pire il agace

Icare, est un héros célèbre de mythologie grecque. Cet homme, pourvu d’ailes, grisé par le vol, finit par s’approcher un peu trop du soleil et brûle avant de sombrer dans l’océan. Le mythe nous dit une chose : à aller trop loin, trop vite, à se prendre pour Dieu, on se « brûle les ailes. »  C’est ce qui arriva à l’acteur Helmut Berger qui nous a quittés le 18 mai 2023 à Salzbourg à l’âge de 78 ans.

De son vrai nom Helmut Steinberger, il est remarqué en 1964 par l’aristocrate réalisateur Luchino Visconti qui tourne Sandra à Volterra en Toscane.  Visconti, impressionné par sa beauté et malgré les 32 ans de différence, le séduit et devient ainsi son amant et protecteur.  Berger se transforme en muse pour le réalisateur qui lui offrira son génie et lui fait l’amour par le biais de sa caméra. Il lui offrit deux rôles primordiaux les Damnés où il apparaît travesti en Marlène Dietrich dans son premier rôle L’Ange bleu et dans un opus magnifique Ludwig : Le Crépuscule des dieux.  Il y joue le rôle du très beau mais très perturbé roi Louis II de Bavière.  Visconti persuade l’actrice Romy Schneider dont il est proche, d’enfiler le costume de Sissi une dernière fois. Celle-ci accepte enfin après de sérieuses négociations, tant elle ne voulait plus entendre parler de ce rôle qui l’a rendue mondialement célèbre à l’âge de 16 ans.

Visconti offrit un autre rôle majeur à son amant dans Violence et passion avec le légendaire Burt Lancaster et la très élégante Silvana Mangano.  Deux mondes s’affrontent devant la caméra, le nouveau et l’ancien.  Le nouveau est celui du gigolo (Helmut Berger) d’une riche femme et qui va tenter de séduire le vieil aristocrate (Burt Lancaster) qui leur loue une partie de son palais.  On devine au travers des scènes, les relations sous-jacentes entre le réalisateur et son protégé. À la mort de Visconti et sans son appui, Berger perd pied et commence une descente aux enfers qui sera visible dans le film de Bertrand Bonello Saint Laurent où il joue le rôle du couturier avant sa mort.  Ironie du sort, dans une scène du film, il regarde dans sa chambre le film Les Damnés où il était dans sa jeunesse et beauté étincelante.

En 2015, il publie ses mémoires sous le titre Autoportrait – 70ème anniversaire paru aux Éditions Séguier.  Il s’y raconte sans pudeur et confie avoir besoin d’amour ou d’attention ? Peut-être confond-t-il les deux ?  Il commence ses mémoires par raconter une anecdote comme quoi Alain Delon voulait lui prendre l’amour de Visconti.  Delon dictait des lettres d’amour enflammées à l’attention de Visconti à son fils de 7 ans… Pour se venger, Berger coucha avec la femme de Delon, Nathalie et en même temps avec l’actrice Maria Schneider qui se fit connaitre par le film scandaleux pour l’époque, Le dernier tango à Paris avec Marlon Brando pas encore obèse. Ne dit-on pas que la famille du cinéma est « une grande famille… »  Il affiche au grand jour sa bisexualité et sa relation avec l’actrice et mannequin Marisa Berenson, petite fille de la couturière Elsa Schiaparelli.

Dès les premières lignes il affiche une méchanceté surprenante, il ne travaillait pourtant pas dans la mode ?  Il avoue que dans sa jeunesse, son père le tabassait et sa mère le gâtait (trop visiblement…). Il est vrai qu’il avait le goût du travestissement ce qui irritait son père.  Il confesse : « J’aimais tellement être une femme fatale et fatale fut ma vie sexuelle. »   Après le lycée, il intègre une école de commerce et il rejoint un internat religieux qui le traumatise à vie.  Il fait l’école hôtelière et aide ses parents dans leur restaurant.

Il part à Londres où là aussi, il travaille dans un restaurant.  Il rencontre le photographe de mode David Bailey qui lui tire le portrait et lui fait, entre autres, son book de photos indispensable pour tout mannequin. Il prend aussi des cours d’art dramatique et s’adonne aux drogues telles que le LSD, la cocaïne, l’ecstasy, elles resteront ses amies tout au long de sa vie mais ravagent sa beauté et sa réputation. Et puis, la vie, un jour, place sur son chemin un aristocrate appartenant à une des plus illustres familles italiennes, les Visconti di Modrone.  Visconti est comte mais aussi bisexuel, il fut l’amant de l’horrible Coco Chanel, grande collaboratrice durant le seconde Guerre Mondiale et grande « horizontale » devant l’Eternel. La relation entre les deux hommes, fut bancale dans le sens où quand Visconti se lassa de lui, Berger devint follement amoureux et se déclara, lors du décès du cinéaste, comme étant sa veuve, bien que la famille des Visconti di Modrone lui interdit l’accès à la chambre où était décédé son amant.  Le cinéma lui offre quelques rôles mais l’ange décline, il lasse avec ses frasques, pire il agace.  Ce livre d’un enfant gâté et surprotégé, regorge cependant de quelques vérités : « Beaucoup plus de gens seraient bisexuels, s’ils se le permettaient. Au fond, ils sont pauvres, car ils leur manquent la moitié de la lune ».  Il fut l’amant du danseur étoile Rudolf Noureev qui fut aussi l’amant de l’acteur Hiram Keller, qui lui, avait une aventure avec Loulou de la Falaise… Il écrit à propos de Noureev, « Noureev fut animal, mon corps devint pure lubricité. »

Cet ouvrage reste comme le témoignage de la vanité d’un bel homme grisé par sa proximité avec la personnalité et le talent irradiant de son vieil et riche amant. Il s’est réchauffé mais aussi brûlé à son contact car Icare n’est pas seulement un mythe mais aussi parfois, une triste réalité…

Helmut Berger, Autoportrait – 70è anniversaire  Propos recueilli par Holde Heurer -Éditions Séguier – 330 pages – 21 € editions-seguier.fr

Photo : D.R Avec Marisa Berenson lors du tournage du Jardin des Finzi-Contini en 1970

Photo : D.R – La scandaleuse scène de l’inceste avec Ingrid Thulin dans Les Damnés

Helmut Berger

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