La Cible
Un film prémonitoire...
Le culte américain
pour les armes à feu
Carlotta Films propose aux cinéphiles le coffret d’un très joli film rare et entièrement restauré, La cible de Peter Bogdanovich, critique cinématographique respecté, acteur et réalisateur.
Il joue d’ailleurs dans ce film le rôle d’un réalisateur qui souhaite faire un dernier film avec le légendaire Byron Orlok qui n’est autre que Boris Karloff, la créature du Docteur Frankenstein à l’écran, qui tourna environ 166 films pas tous remarquables.
Le pitch : Byron Orlok, célèbre acteur de films d’épouvante, décide de mettre un terme à sa carrière. Sa dernière apparition aura lieu le lendemain à un drive-in où il présentera son ultime film. Parallèlement ce jour-là, Bobby Thompson, un jeune psychopathe obsédé d’armes à feu, massacre froidement sa famille avant de tuer au hasard le plus grand nombre de gens possible…jusqu’au drive-in.
Boris Karlof, de Frankenstein à La cible
Le coup de génie du film est d’avoir associé une réflexion (alors neuve et prémonitoire) sur la violence contemporaine et le culte américain des armes à feu à une réflexion sur le cinéma, à travers la confrontation de deux formes de terreur : l’une, stylisée par les films d’horreur et l’autre, aveugle et moderne, représentée par les tueurs fous qui défraient régulièrement la chronique aux États-Unis. Un thème aujourd’hui récurrent avec le bouleversant Elephant de Gus Van Sant qui reçoit La Palme d’Or à Cannes en 2003 ; ou encore Bowling for Columbine de Michael Moore qui reçoit l’Oscar du meilleur documentaire en 2002. La cible présentée en 1968 et malgré le sujet, n’a pas la violence cinématographique d’aujourd’hui. Il est toutefois l’illustration de ces personnes fragiles psychologiquement voire dérangés qui éprouvent une jouissance à tuer.
Mais ce que l’on retiendra surtout est le jeu de Boris Karloff qui porte un regard sans fard sur sa carrière et le temps qui passe. La réalité rejoint la fiction avec la question « que deviennent les acteurs vieillissants autrefois encensés ? ». On devine dans ses paroles, ses expressions et son regard, une immense lassitude qui touche au plus près le spectateur. Il ne fait pas bon vieillir dans l’industrie du cinéma…
Quoiqu’il en soit, la restauration est superbe ! Le plus de ce beau coffret est un Blu-ray et un DVD, une affiche du film, douze photos en noir et blanc du tournage et un petit mot manuscrit que Peter Bogdanovich a adressé au grand maître du suspens, Alfred Hitchcock. Une édition Prestige limitée, un must que l’on doit avoir dans sa collection.
Alain PIZAINE
La Cible – de et avec Peter Bogdanovich et Boris Karloff – Édition Prestige limitée – Couleurs – 1h30 – Blu-ray + DVD + 12 photos + l’affiche du film 33,92 €- carlottafilms.com