GALERIE MANIFESTA - LYON

Sur le trottoir, une interpellation « Coucou » encourage à pousser la porte. N’hésitez pas à explorer la galerie Manifesta, ouverte en 2019. Tout est beau, des locaux (un ancien atelier de négoce de la soie) au thème de cette exposition dans l’esprit des cabinets de curiosités qui mêle peintures, dessins au stylo, céramiques, photos et sculptures (jusqu’au 25 juillet 25).

Un lieu sublime

Située à deux pas de l’hôtel de Ville et du musée des Beaux-arts de Lyon, elle a ouvert ses portes à l’initiative de Céline Melon Sibille, passionnée d’art contemporain. L’espace étonnant compte deux niveaux (210 m2) desservis par un majestueux escalier en bois, sublimé par une tonalité bleu Klein. La décoration est signée Claude Cartier, une autre Lyonnaise, architecte d’intérieur de talent. Cette dernière a souhaité retranscrire un univers qui se rapproche d’un lieu de vie et non de passage. Et c’est réussi. Le visiteur captivé par ce décor théâtral, tout en rondeur, de mobilier contemporain (table monumentale, luminaires, banquette, rideaux de velours…), n’aspire qu’à s’y attarder.

Des galeries invitées

L’autre originalité de Manifesta, c’est son ambition à favoriser les rencontres entre les galeries, les artistes et les entreprises. Elle n’accueille pas les créateurs en direct, mais négocie avec les galeries, notamment parisiennes, qui choisissent les œuvres (et dont voici la 25^e programmation depuis son ouverture).

Elle leur offre ainsi l’opportunité d’aller à la rencontre de leur public en région. Et pour les amateurs lyonnais, elle ouvre une fenêtre supplémentaire sur l’art contemporain. Il faut oser pousser la porte, mais Céline Melon et son équipe sont toujours ravies de présenter les expositions aux curieux. Elles veillent aussi à ce que les œuvres puissent être accessibles à (presque) toutes les bourses (à partir de 600 euros cette fois-ci pour les tirages de Sabine Pigalle). Si un accrochage résume bien l’ambition de Manifesta, ce sont les « Curiosités » par Olivier Castaing et la Team School Gallery (Paris). Sa sélection compose un paysage visuel nourri de légèreté, de couleurs et de fantaisie.

Ecrin du merveilleux

Au cœur du dispositif, Jeremy Jaspers (né en 1977 à Berlin, installé à Paris) capte avec sensibilité la beauté singulière de ceux qu’on ne voit pas dans les canons de beauté habituels. Ses portraits d’hommes albinos ou atteints de vitiligo interrogent le regard porté sur l’autre.

Le marseillais Olivier Gruber (né en 1969) dessine au stylo à bille un univers foisonnant de chimères végétales très colorées en s’affranchissant des frontières des cadres carrés ou rectangulaires.

Konrad, né en 1970 et diplômé de l’École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris, déploie des herbiers hyperréalistes tracés, aux aussi, au stylo bille.

Onno Theelen, 27 ans, étoile montante néerlandaise de l’art céramique contemporain, livre une ménagerie, pleine d’humour et de spontanéité, remarquable par ses prouesses techniques.

La Fratrie, artisans français d’un monde utopique, réalisent des édifices minutieusement construits.

Safia Hijos, basée à Nîmes, distinguée à la Biennale de Vallauris, vient de commencer une résidence à la manufacture de Sèvres. Elle laisse proliférer des formes végétales et minérales de céramiques jouant entre enchantement et maîtrise impossible de la nature.

Sabine Pigalle, photographe plasticienne, dévoile une galerie de portraits où le passé dialogue avec le présent. Elle réinterprète des portraits de la Renaissance dont les visages sont masqués par des animaux.

Ce groupe foisonnant et éclectique évoque l’esprit des cabinets de curiosités d’antan, écrins du rare et du merveilleux, qui deviennent, ici encore, source d’enchantement.

Isabelle BRIONE

« Curiosités » Jeremy Jaspers & la Team School Gallery,  chez Manifesta, 6 rue Pizay, Lyon 1^er, ouvert du lundi au vendredi de 11 à 18 h jusqu’au 25 juillet 2025. Plus d’infos : https://manifesta-lyon.fr/