LA TOUR D'AMOUR
Le roman le + insolite
Des scènes comiques, voire érotiques
Ah, que voilà un livre étonnant mais passionnant. En effet, l’auteure Rachilde, née Marguerite Eymery, surprend le lecteur avec un roman sombre, La Tour d’amour. Elle narre avec talent, le huis clos de deux hommes isolés dans le phare Ar men qui en breton veut dire “le roc”. Dans la réalité, Ar men se dresse au bout de la chaussée de Sein, constitué d’un chapelet de récifs, fort dangereux pour les bateaux. Sa construction difficile s’étala sur quatorze années entre 1867 et 1881.
Rachilde confesse que la bibliothèque de son grand-père l’a sauvée du suicide et que l’écriture la détourna de la folie. Son futur mari, Alfred Vallette, lui écrit d’ailleurs : « Vous ne parlez jamais de votre famille. On vous croirait presque née d’une génération spontanée ». La folie, elle, guette les héros de son roman, gardiens de phare rongés par la solitude. Rachilde décrit le délire du vent, le déchaînement des vagues qui charrient les corps des noyés lorsqu’il y a naufrage, la mort qui les frappe sans que l’on puisse venir chercher le corps avant quinze jours. Tout cela crée une ambiance malsaine et le malaise s’accentue à la fin de ce roman dit « fin de siècle » (fin XIXème siècle plus précisément). Rachilde aborde là aussi la sexualité. Chacun peut comparer les phares à des phallus en érection, même si les personnages des romans de Rachilde sont dans l’ensemble, tous bisexués, ce n’est pas le cas ici des deux protagonistes. Ils ont une sexualité hétérosexuelle mais perverse pour le plus âgé.
Ce roman, puissant, violent, choquant, fait scandale mais connaît un véritable succès. Il donne lieu en 1938 à une pièce de théâtre mise en scène par Marcelle Maurette et représentée au célèbre théâtre du Grand-Guignol. En 1984, le théâtre Essaïon présente La Tour d’amour dans une nouvelle mise en scène réalisée par Jeanne Champagne et qui obtient un grand succès.
Un livre, une curiosité et une auteure à redécouvrir au plus vite !
La Tour d’amour – de Rachilde – Éditions L’imaginaire Gallimard – 192 pages –8,90 € – gallimard.fr
