L'Église - une omerta française
Les secrets d'enfance de Roselyne Bachelot
Pour l'Église, l'indécence n'a pas de limite
Roselyne Bachelot-Norquin, a été plusieurs fois ministre sous les présidences de Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron. Elle est aujourd’hui éditorialiste sur BFM TV, RTL, France Musique et Forum Opéra. Elle est connue non seulement, pour ses tailleurs flashy mais pour ses prises de position courageuses en faveur de différentes causes : l’Avortement, le Sida, le Mariage pour tous et aujourd’hui, elle publie un livre, Une Omerta française – Secrets d’enfance aux éditions Plon sur les violences sexuelles et sexistes au sein de l’Église, vaste programme hélas…
L’Église est au centre de divers scandales pédophiles…l’opinion publique était déjà alertée par le livre de Frédéric Martel, Sodoma vendu à un million d’exemplaires, ou encore celui de Laetitia Cherel et Marie-France Etchegoin, L’abbé Pierre, la fabrique d’un saint (article paru dans notre N° de septembre). C’est dire si ce sujet bouleverse. Roselyne Bachelot brise les préjugés en racontant son enfance. Elle parle des silences imposés dans sa famille. On ne parlait guère dit-elle, d’une amie d’enfance de sa mère qui s’était suicidée à l’âge de quatorze ans après avoir été violée par un prêtre. Elle évoque la colère de sa mère lorsque l’abbé L, obsédé par le sexe, recevait les jeunes pensionnaires en tête à tête pour les préparer à « leur vie de femme… ». Ce livre est ainsi né de la volonté de dévoiler au grand jour les violences sexuelles et sexistes qui ont traversé plusieurs générations au sein de l’Église. Un témoignage qui fait voler en éclat l’omerta qui régnait alors.
Les exemples sont nombreux, à Toulouse l’archevêque du diocèse Mrg de Kerimel, nomme chancelier l’abbé Dominique Spina, un prêtre condamné à cinq ans de prisons dont un avec sursis pour viol sur mineur. En 2025 la nomination de Spina en tant que chancelier provoque la colère des associations de victimes. Le journal catholique La Croix prend la défense du prélat et les réactions du clergé sont inexistantes…
La Charité du Bon Pasteur ou un Enfer sur terre
On désigne sous le terme « couvent de la Madeleine » des institutions religieuses destinées à punir et à rééduquer les filles « perdues. » On estime que 30.000 femmes y ont été séquestrées dans des conditions épouvantables d’exploitations, de sévices et parfois de violences sexuelles. Le Bon Pasteur se voit confié par l’État une fonction de « maison de correction ». Le transfert des allocations familiales se fait dans la caisse de la communauté. Un pactole car l’argent n’est jamais versé à ces pauvres filles. La chanteuse Nicoletta placée à l’âge de 16 ans au Bon Pasteur de Lyon raconte : « Lorsque je franchis le porche du Bon pasteur, ce n’est pas dans la maison de Dieu que je pénètre, je viens de gagner un aller simple pour l’enfer ! »
François, juré dans un procès de pédophilie lié à un prêtre
Un juré assiste un jour au procès d’un prêtre homosexuel déféré devant la cour pour agression sexuelle et viol sur mineur de moins de 15 ans. Il était alors surveillant dans un lycée religieux du diocèse. Le prévenu avait reconnu les faits et indiqué que lui-même avait été violé par le curé de son village. Le directeur de l’établissement avait pris sa défense, en indiquant qu’il faisait l’objet de manœuvres incessantes de séduction de la part des élèves, que les victimes se comportaient comme des avatars du démon tentateur… Le pire, François avait reconnu dans le box des accusés, son tortionnaire ! Après une forte dépression, il demande un entretien avec l’évêque mais est reçu par le vicaire général. À l’écoute de son récit, ce dernier lui dit qu’il cherche à salir une institution et discréditer des prêtres « exemplaires » qui avaient juste des gestes de tendresse. La sodomie pratiquée sur un jeune mineur serait-elle un geste de tendresse pour l’Église catholique ?
Le mutisme des papes, de Paul VI à Léon XIV
Roselyne Bachelot précise que les crimes et les abus sexuels commis par des ecclésiastiques ne sont pas liés à l’exigence du célibat. Elle interroge sur ce qui a permis à l’Église de bâtir une citadelle du silence avec la complicité de multiples acteurs. Quand Paul VI à la tribune des Nations unies ose dire que : « L’Église catholique est une experte en humanité »… On doit cependant rendre hommage au pape Benoît XVI qui mène une politique sans faiblesse contre les auteurs de crimes sexuels. Il destitue des prêtres protégés par Jean-Paul II.
Le pape François après avoir couvert l’évêque Juan Barros au Chili, reconnaît, après une enquête de 2.300 pages, avoir commis « de graves erreurs dans l’évaluation de la situation ». Toutefois, il refuse la démission du cardinal Barbarin, évêque de Lyon qui a couvert longtemps, les agissements du prêtre Bernard Preynat au grand dam des nombreuses victimes. Il abolit le secret pontifical en matière de lutte contre les sévices sexuels commis par des membres du clergé. Reste à savoir quel rôle va jouer le pape Léon XIV contre ce fléau ? On referme le livre de Roselyne Bachelot, écœuré une fois de plus, par le comportement de prêtres pédophiles et de leur hiérarchie.
« Je veux briser les préjugés que j’ai combattus tout au long de ma carrière au service des plus faibles. »
Un essai choc, marquant…
Christian CHARRAT
Une omerta française – Secrets d’enfance – de Roselyne Bachelot – Éditions Plon – 240 pages – 20,90 € – lisez.com/editeurs/plon