Supersex
La série la + provocatrice de Netflix à ce jour
Toutes les photos : © Lucia Luorio – Netflix
Son endurance fait merveille
À l’époque où le porno est en libre accès sur Internet, le sexe fait désormais partie du quotidien. La série (controversée) de Netflix Supersex, est inspirée de faits réels. Elle raconte l’histoire de l’italien Rocco Siffredi, issu d’un milieu populaire et devenu l’une des plus grandes stars mondiales du porno.
L’acteur que l’on aperçoit au début dans un restaurant à la manière d’Alfred Hitchcock, a choisi de s’appeler Rocco Siffredi en hommage à Alain Delon dont c’était le nom dans le film Borsalino de Jacques Deray. Il est interprété dans la série par Alessando Borghi, qui est impressionnant par son jeu et par sa ressemblance, à bien des égards, avec le véritable Rocco Siffredi. À travers lui, on perçoit le vide, le sordide et la tragédie…
En dehors des scènes de sexe simulées, on découvre surtout comment l’industrie du porno s’est développée dans le monde entier dès les années 70. Les romans photos à cette époque, dont le célèbre Supersex, circulaient sous le manteau. Certains producteurs, flairant la bonne affaire, s’emparèrent de ce secteur et les films remplacèrent les livres générant de gros profits. Mais pour cela, il fallait trouver des hommes et des femmes prêts à s’exhiber devant la caméra.
Un série maîtrisée
Glauque et tragique à la fois, on se laisse émouvoir par la vie pas toujours facile des « Stars » de ce milieu. Il suffit de revoir le chef d’œuvre Boogie Nights de Paul Thomas Anderson sorti en 1997 avec Mark Wahlberg, Burt Reynolds et Julianne Moore (admirable) pour s’en convaincre. La vie de ces acteurs est souvent cruelle. Celle du petit Rocco Tano vivant dans une petite ville d’Italie au sein d’une famille de plusieurs garçons est à cette image. L’aîné Claudio ayant été pris à partie par une bande de gitans est devenu handicapé et décède peu de temps après. Le père est très autoritaire, la mère n’a d‘yeux que pour l’aîné handicapé. Le bambin voue un culte à son demi-frère Tommaso, beau garçon, un flambeur qui sort avec la plus belle fille du village, Lucia. Dans les années 80, Rocco quitte son village et va rejoindre Tommaso à Paris et les trois habitent tous ensemble. Tommaso force Lucia à se prostituer à Pigalle… Nous assistons au quotidien (pénible et mélodramatique) des trois personnages dont le comportement de Tommaso déclenche hystérie et violence partout où il passe.
Cinéma, naissance de la légende Siffredi
Le gamin se transforme en un jeune homme séduisant très porté sur le sexe et doté d’attributs masculins impressionnants. Il se livre à tous les excès de la chair dans un club échangiste, mais appelle régulièrement sa mère très pieuse, cherchant sans cesse son approbation, elle qui souhaitait le voir devenir prêtre… Par la suite, le succès venu, il lui envoie régulièrement de l’argent bien qu’elle désapprouve fortement son métier qui jette l’opprobre sur sa famille restée au village. Par un concours de circonstance, il se lie d’amitié sincère, lui le mâle dans toute sa force et virilité, avec un homosexuel atteint du Sida. Il tourne un premier film et son endurance fait merveille. Cependant, un détail choque terriblement, il est violent dans ses rapports sexuels avec ses partenaires, elles n’existent pas, elles ne sont là que pour son plaisir, il n’y a aucune tendresse, il baise, il les humilie, les brutalise, ce qui aujourd’hui commence à ne plus être accepté. Il se définit lui-même comme un animal. Son leitmotiv avec Tommaso est « Le monde veut nous baiser, on va baiser le monde ». Il se sent terriblement seul malgré le succès car on ne voit en lui qu’une bête de sexe. Il tente une vie de couple avec Rozsa Tashi, une ancienne Miss Hongrie épousée en 1993 et décide d’arrêter sa carrière. Ce qu’il fait durant deux ans. Même si tous les après-midi, il va voir des prostituées car il continue d’être accro au sexe. Il reprend le travail, sa femme préférant le voir coucher avec une actrice sur un plateau qu’avec des prostituées…
L’enfer de Dante revisité
De cette série se dégage un malaise et une tristesse évidente. On ne peut que se prendre d’affection mêlée de pitié pour cet enfant au destin peu reluisant qui se perd au fil du temps, prisonnier d’une sensualité incontrôlable et d’un demi frère toxique. Ce n’est pas juste une série « scandaleuse » c’est aussi un cruel portrait d’un milieu particulier et d’une société qui estime à 73% en France que les mineurs sont mal protégés contre les problèmes affectifs liés à la porno-dépendance…
Cette série se regarde comme on regarde L’Enfer de Dante du peintre Gustave Doré, c’est dire…
Christian Charrat
Supersex – avec Alessandro Borghi, Adriano Giannini, Jasmine Trica – 7 épisodes – netflix.com