FESTIVAL LUMIÈRE 2024
RENCONTRE AVEC VANESSA PARADIS
Vanessa Paradis et Thierry Fremaux Photo : © Lea Rener
Le tourbillon de
"sa" vie
C’est un cliché de décrire Vanessa Paradis comme une éternelle Lolita de la chanson et du cinéma mais c’est pourtant la vérité. Cette femme qui confesse avoir eu beaucoup de chance dans sa vie, (ne dit-on pas qu’elle a les dents du bonheur) rayonne totalement. Bien que toute menue et pas très grande, elle impressionne le public qui l’accueille par une longue standing ovation.
Elle admire Marylin Monroe
Son mari, Samuel Benchetrit est présent dans la salle et elle affiche publiquement son amour pour le nouvel homme de sa vie. L’univers de son époux est particulier car il voit le monde autrement ce qui séduit sa femme. Samuel Benchetrit lui a dédié une pièce Mamam au théâtre Edouard VII qui remporta un grand succès. La journaliste Virginie Apiou est chargée de mener l’entretien et on la sent plus dans sa zone de confort que face à Xavier Dolan… Quand elle demande à Vanessa Paradis quel est son film culte, c’est sans hésitation que l’actrice cite Chantons sous la pluie de Stanley Donen qui peut lui tirer des larmes. En second, elle opte pour Funny Girl de William Wyler avec l’étonnante Barbra Streisand. Les deux films étant des comédies musicales, elle confesse rêver de jouer dans ce type de comédie. Elle reconnaît avoir été nourrie par le talent de Marilyn Monroe, Romy Schneider et Barbra Streisand. Elle n’a jamais essayé de leur ressembler, elle s’est contenté de les admirer.
Elle se confronte à différents genres
Vanessa Paradis, au cinéma, se confronte à différents genres et n’hésite pas à se mettre en danger par rapport à son image. Lorsqu’on lui demande quels sont les critères qui la décident à accepter certains rôles ? Elle choisit avant tout une histoire puis le ou la réalisatrice qui dirige. Elle a aussi très envie de s’étonner elle-même. Elle surprend par exemple le public avec le long monologue plan séquence de La fille sur le pont de Patrice Leconte où elle est absolument bouleversante. Afin de s’imprégner du texte, elle s’enferme dans sa loge entourée de bougies avec une chanson de Tom Waits fort triste. Patrice Leconte frappe à sa porte, entre et en voyant le contexte se met à rire, cassant par son fou rire la concentration de l’actrice qui en rit aussi aujourd’hui. Elle ne cache pas qu’elle ne peut revoir cette séquence sans avoir les larmes aux yeux. Si elle apprécie beaucoup ce metteur en scène, elle avoue que c’est une sorte de fou furieux prêt à prendre des risques insensés pour un bon cadrage. Elle définit le cinéma de Patrice Leconte comme étant très sensuel.
Leconte l’a dirigé à deux reprises pour La fille du pont et pour Une chance sur deux qui ne fut pas un succès. C’est l’affrontement amical de deux monstres sacrés du cinéma français qui cabotinent devant la caméra. Si Jean-Paul Belmondo est très entouré et rit beaucoup, Alain Delon lui est plus distant s’isolant avec ses chiens mais contrairement à la légende, ils s’apprécient beaucoup.
Elle aime les rôles de femmes fortes
Virginie Apiou met l’accent sur le fait qu’elle joue souvent des rôles de femmes seules. Visiblement, elle n’y avait pas prêté attention. Dans le film, Apprenti Gigolo de John Turturro, elle joue une veuve juive et donne la réplique à Woody Allen qui dès le premier jour, improvise ce qui la déstabilise totalement. Le réalisateur, lui, l’emmène avec lui en repérage pour qu’elle s’imprègne de la culture juive, elle va jusqu’à célébrer des fêtes juives. Elle n’a aucun problème à tourner pour des réalisateurs ou des réalisatrices mais elle reconnaît qu’avec les femmes, il y a des évidences qui se passent de commentaires. Elle garde un souvenir fort de la réalisatrice Anne le Ny, qui dans son film Cornouaille (2012), l’a poussée très loin dans l’exigence avec un nombre de prises incalculables.
Elle joue encore une femme forte et lesbienne dans le film Le couteau dans le cœur (2018) de Yann Gonzales. Thriller érotique avec des couleurs et des sentiments qu’il faut crier voire hurler, un rôle qui fait mal. Elle reste très marquée par le dernier film du canadien Jean-Marc Vallée (décédé il y a deux ans) C.R.A.Z.Y en 2005 et avec qui elle tourna Café de Flore en 2012. Elle joue la mère d’un jeune garçon trisomique dans les années 60. Elle ne laisse pas la société décider à sa place pour son enfant. Pour ce très beau rôle, elle n’a pas passé de casting. Elle arrive en retard au rendez-vous car son enfant est malade. Le réalisateur, de très mauvaise humeur, est agacé par son retard. Elle ne fait donc aucun effort pensant que de toute façon, elle ne serait pas prise, ce fut l’inverse… Elle partage l’affiche avec un jeune garçon trisomique de dix ans qui manque de concentration et fait l’opposé de ce que le réalisateur demande. Jean-Marc Vallée met la barre très haute. Elle doit gommer la douceur de sa voix et cette première expérience avec le handicap, la marque profondément. Elle avoue en riant, qu’elle travaille sa voix dans les films à l’oreille comme la musique. Elle croit d’ailleurs, qu’elle chante mieux sans micro.
Le Yin et Yang de Jeanne Moreau
Elle parle avec franchise de sa rencontre mémorable avec Jeanne Moreau au Festival de Cannes où elle chantait Le tourbillon de la vie de Serge Rezvani. Devenue amie avec l’actrice mythique, elles tournent un film ensemble. Elle reconnaît être heureuse de ce lien d’amitiés avec Jeanne Moreau car celle-ci avec sa double personnalité masculine et féminine pouvait être féroce si elle ne vous aimait pas. Son prochain film signé Anne le Ny, Dis-moi juste que tu m’aimes sort en février 2025. Serait-elle tentée de devenir réalisatrice ? Jamais ! Elle se concentre sur son prochain album très attendu…
Un bel oiseau de Paradis qui envoûta l’assistance.
Christian CHARRAT
Le Festival Lumière de Lyon a lieu chaque année en octobre – Plus d’informations sur festival-lumiere.org