YVES SAINT LAURENT ET LA PHOTOGRAPHIE
Une Success Story qui fut d'abord une histoire d'amour

Photo ci-dessus : Irving Penn. Yves Saint Laurent, Paris, 1957.Avec l’aimable autorisation de The Irving Penn Foundation / Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent.
Un génie admiré mais très tourmenté
Toujours dans le cadre des rencontres d’Arles, si vous aimez la mode vous devez vous arrêter à Luma dont le bâtiment étonnant fut créé par Frank Gehry à la demande de la riche mécène Maja Hoffmann. L’exposition phare est consacrée à un génie de la mode qui nous a quitté le 1er juin 2008, Yves Saint Laurent. C’est une exposition exceptionnelle consacrée à sa relation avec les photographes et le regard que chacun porte sur le couturier et son travail. De son vrai nom Yves Mathieu Saint-Laurent passe sa jeunesse à Oran mais vient à Paris où il apprend la couture à la Chambre Syndicale.
En 1954, à peine âgé de dix-sept ans, le jeune Yves participe au concours annuel du Secrétariat International de la Laine dont le jury est composé de couturiers célèbres comme Hubert de Givenchy et Christian Dior. Ce concours comprend trois catégories, auxquelles chaque candidat peut participer : manteau, tailleur et robe. La sélection a été faite sur 6 000 croquis et Saint Laurent remporte le troisième prix de la catégorie « robe » le 25 novembre 1954. Son modèle, une robe de crêpe noir, a été réalisé dans les ateliers d’Hubert de Givenchy.
Le début de la gloire
Dans la catégorie « manteau » c’est Karl Lagerfeld qui gagne le prix et les deux jeunes couturiers deviennent amis. Une amitié brisée plus tard par Jacques de Bascher, l’amant de Karl Lagerfeld qui eut une liaison avec Saint Laurent. Ce dernier rejoint le studio de création de Christian Dior au poste d’assistant. Lorsque Monsieur Dior meurt subitement, le très jeune Saint Laurent devient directeur artistique de la marque à seulement 21 ans. Ce qui lui vaut ses premières photos dans la presse du monde entier. Auréolé d’une gloire toute fraîche, il décide de créer sa propre maison de couture avec l’aide de son compagnon Pierre Bergé, un génie des affaires qui lui apportera la sécurité financière et transformera la marque en empire.
Une mutation très photogénique
Au fil de l’exposition, on voit le couturier changer et on suit sa transformation. Les magazines l’adulent, ses réalisations sont photographiées et prisées dans le monde entier. Tout est inspiration pour le couturier : le Pop Art, les artistes comme Van Gogh, Mondrian, Picasso, les Lalanne, les ballets russes, l’Afrique, le Maroc…
Un échec retentissant
Il connait pourtant un échec retentissant le 29 janvier 1971 avec la collection dite « Libération » ou « Quarante », inspirée des années marquées par la guerre. C’est Paloma Picasso, parce qu’elle s’habille aux puces, qui inspira le couturier. Robes courtes, semelles compensées, épaules carrées, maquillage appuyé, ces références au Paris de l’Occupation font scandale. Violemment critiquée par la presse, la collection donne pourtant le tempo au courant rétro qui envahit rapidement la rue. Les magazines illustrent cette collection provocante avec des clichés.
Le gotha de la photographie au chevet d’un esthétisme absolu
Les photos de mode sont un palimpseste où chacun exprime son style, sa vision et son talent. Résultat, les clichés sont absolument superbes. Helmut Newton shoote la publicité du parfum Opium dans l’appartement du couple au 55 rue de Babylone à Paris. C’est Jeanloup Sieff qui shoote le couturier, à sa demande, dans le plus simple appareil pour le parfum Pour Homme. Paolo Roversi, Horst P Horst, Jean Paul Goude, Bettina Rheims, William Klein, Robert Doisneau, David Bailey, Pierre Boulat, Cecil Beaton, Jacque Henri Lartigue, Vladimir Sichov, Gian Paolo Barbieri, Irving Penn, Dominique Issermann, David Seidner, Peter Lindbergh, Patrick Demarchelier, Cindy Palmano. Les plus grands photographes de la planète participent à la reconnaissance et à la gloire de cet homme fragile, tourmenté mais habité par un véritable talent. Lequel a fait de lui l’une des figures emblématiques de la mode du 20ème siècle.
Christian CHARRAT
PS- Voir l’excellent film Saint Laurent de Bertrand Bonello avec Gaspard Ulliel (2014)
Yves Saint Laurent et la photographie – Pavillon La Mécanique Générale – Tous les jours de 10 à 19 h – Entrée 13 € – LUMA Arles, Parc des Ateliers, 35 avenue Victor Hugo, 13200 Arles – Tél : + 33 (0)4 65 88 10 00 – luma.org
Photo ci-dessous : Peter Knapp. ELLE, septembre 1965. Robes de cocktail de la collection haute couture automne-hiver 1965 dite « hommage à Piet Mondrian ». Avec l’aimable autorisation d’Yves Saint Laurent / Jeanne Lanvin-Castillo / Peter Knapp.