l'édito

de Christian Charrat

Spécial

mode
Homme

Non Genré et Bling Bling vs le Chic Absolu que choisir ?

Photo : © Défilé Giorgio Armani printemps été 2024. D.R

Paris à la fin juin s’agite et voit débarquer une faune hétéroclite qui vient du monde entier pour assister aux défilés de mode masculine.  Ce qui interpelle dans cette semaine de collections masculine c’est le nombre de marques qui défilent.  La mode masculine est restée longtemps le parent pauvre des Fashion Week internationales, ils sont désormais nombreux les stylistes hommes à défiler à Paris.  

Si les mannequins noirs étaient ostracisés dans le passé, c’est aujourd’hui de l’histoire ancienne car il n’y a pas un défilé sans des mannequins noirs.  De même pour les mannequins asiatiques.  Les défilés sont désormais un joyeux melting pot, mais il se peut que cette volonté de mélanger les mannequins corresponde plus à un merchandising qu’à une idée d’avancer sur la diversité, le milieu de la mode n’est pas reconnu pour son empathie, loin de là.

La quantité des défilés ne fait pas hélas, la qualité.  À commencer par le défilé très « Bling, Bling » de Louis Vuitton sous la direction de Pharrell William qui est la démonstration que d’avoir beaucoup d’argent ne donne pas forcément du goût. Mais la collection devrait néanmoins plaire aux footballeurs et aux nouveaux riches de toutes nationalités. Chez Vuitton, la tendance est à l’homme sandwich tant il y a de logos sur la moindre pièce. Les japonais, Yohji Yamamoto et Comme des Garçons sont fidèles à eux même, dramatiques mais très créatifs. Les pantalons chez Loewe frôlent le ridicule car qui a envie d’avoir la taille du pantalon sous la poitrine ?  Chez Prada les manches sont 10 cm trop longues comment s’emparer de la plus petite tasse à café avec ce genre de vêtements ? C’est aussi le retour des épaules XL très années 80 chez Prada et Yves Saint Laurent.  Chez Yves Saint Laurent, le styliste Antony Vaccarello semble s’être trompé de collection tant ses hommes sont féminins. Cette mode « non genrée » en devient ridicule même pour les associations LGBTQIA+. Quel homme a envie de ressembler à sa femme voire de lui faire concurrence ?

Kenzo lui, tente de remettre au goût du jour le pantacourt qui lui est justement l’expression d’un manque total de goût. Dolce & Gabbana présente eux une collection de haute couture Alta Sartoria pour les non « genrés » mais digne du défilé éclésiastique du film Roma du génial Federico Fellini. Que d’argent dépensé pour des vêtements qui ne devraient vivre que sur un podium et sur des beautés viriles de 1,87m. Dior travaille une gamme de couleur très « Stabilo » assez plaisante avec une scénographie plutôt réussie. Givenchy propose la vision du styliste Matthew M. Williams, une sorte de ligne « Jules » en plus luxueux certes, mais totalement dépourvu de chic. Les vestes sont oversizes, les pantalons nettement trop longs tout comme les manches des vestes et blousons. Les bas des bermudas ou shorts sont effilochés et dignes de la marque Zara !  Si les tissus sont luxueux, on reste toutefois de marbre devant chaque passage. Décevant !

Heureusement, il reste encore des garants de l’élégance au masculin à savoir : Giorgio Armani, Dries van Noten, et la talentueuse Véronique Nichanian qui depuis des années chez Hermès, habille les hommes avec un regard de femme amoureuse de l’homme dans toute sa majesté et virilité. On ne peut qu’applaudir à leur volonté de faire une mode portable et délicieusement raffiné tant dans les détails, les couleurs que les proportions. 

La mode est à un tournant de son histoire, en effet, la priorité désormais est de faire le buzz à tout prix, quitte à sombrer dans le ridicule et l’improbable et de se rattraper sur les logos que l’on pose partout. Tout est fait pour alimenter les réseaux sociaux et des influenceurs prennent le pas sur des journalistes aguerris. Les vraies valeurs sont balayées par des gens incultes vantant n’importe quel produit pour de l’argent à des followers tout aussi incultes et crédules. Si une star fait une campagne de publicité ou se fait rétribuer pour assister à un défilé, au moins celle-ci a travaillé dur pour atteindre le statut de star à l’inverse de cette nuée d’influenceurs sortis de nulle part.

Ce que Michel de Brunhoff, directeur du magazine Vogue France entre 1929 et 1954 appelait « L’Art difficile de l’élégance » est désormais devenu un exercice de style fort rare sur les podiums et c’est à déplorer…