LE NAGEUR

Nager en pleine tempête

le nageur pierre assouline

Pierre Assouline relate dans son bouleversant ouvrage, Le nageur paru aux Éditions Folio, les sévices subis par Alfred Nakache dans les camps d’Auschwitz et de Buchenwald, tristement célèbres pour leur horreur au quotidien.

L’Étoile montante de la natation

Alfred Nakache, né à Constantine en Algérie et de confession juive, surmonte une phobie de l’eau enfantine et devient un nageur recordman du monde et un joueur de water-polo hors pair. Il s’installe à Paris, rejoint le Racing Club de France et s’inscrit au lycée Janson-de-Sailly.

L’attrait de la natation pour les jeunes est exemplifié par des figures comme Johnny Weissmuller, premier Tarzan au cinéma après avoir passé sous la barre de la minute au 100 mètres nage libre. Nakache, bien que dénué du physique de rêve de Weissmuller, compense par une nage puissante, pleine de rage de vaincre. Surnommé Artem (Le poisson), il rivalise avec Jacques Cartonnet et devient champion de France et d’Europe en 1936. Sélectionné pour les Jeux Olympiques de Berlin, il assiste à la scène où Hitler quitte le stade, refusant de saluer Jesse Owens, le sportif noir américain récipiendaire de quatre médailles d’or en athlétisme.

De retour en France, Nakache quitte le Racing Club de France en raison de l’antisémitisme ambiant. Il s’installe à Toulouse avec sa femme et sa fille. La guerre éclate, et tandis que certains Français sympathisent avec l’occupant allemand, d’autres, comme Nakache, résistent. Le sport national est alors la délation… Nakache est dénoncé à la Gestapo par un certain Jacques Cartonnet, son grand rival en compétition.

L’enfer des camps

La jeune génération ignore souvent les atrocités nazies qui visaient, dès l’arrivée au pouvoir d’Adolf Hitler, à exterminer non seulement les juifs mais aussi les communistes, les opposants politiques, les tziganes, les homosexuels et les handicapés.

Le cauchemar commence alors pour Nakache. Lui, sa femme et sa fille sont déportés au camp de concentration d’Auschwitz. Ils sont séparés et ne se reverront jamais. À la fin de la guerre, les Allemands évacuent Auschwitz pour Buchenwald.  Des milliers de prisonniers, hommes, femmes, enfants marchent durant six jours dans un froid glacial sans aucune nourriture. Ceux qui tombent de fatigue sont abattus. L’armée américaine libère le camp de Buchenwald en avril 1945 saisie par l’horreur de ce qu’elle découvre. L’auteur évoque la difficulté de se reconstruire après de telles épreuves avec une émotion qui vous prend aux tripes et ne vous lâche plus.  On attend, on espère avec Nakache, on l’encourage à ne pas se noyer dans sa tristesse, on compte sur sa résilience. L’empathie suscitée par l’auteur est un hommage poignant à ce héros de la natation.

Les passionnés d’histoire contemporaine pourront aussi regarder sur Netflix la série terrifiante :  Hitler et les nazis, le procès du mal. Une période très sombre de l’histoire qui nous fait réfléchir… Jusqu’où un homme ayant affronté le mal absolu peut-il aller pour ne pas s’effondrer, surmonter sa souffrance et se projeter à nouveau vers l’avenir ?

Christian CHARRAT

Le nageur – de Pierre Assouline – Éditions Folio – 304 pages – 9,40 € – folio.com

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